vendredi 7 novembre 2014

Eurekà de l'altérité


C'est dans ces échanges improbables qu'aventure le net que sont nés ces textes.


Merci à Giordano qui les a conjugués en italien sur "Extemporalitas". Paris abrupts de traduction.



Et qui en a extrait chaudes couleurs, de son point de vue. Grand merci Giordano !



http://www.extemporalitas.org/eureka-de-lalterite/
http://www.extemporalitas.org/devenir-terreau-dune-autre-langue/

samedi 1 novembre 2014

L'aventure de la lettre




"L'écriture commence où finit la psychanalyse[1]"J’ai su au moment où j’ai lu cette phrase, qu’il ne s’agissait pas tant de l’impuissance de la psychanalyse à traiter de certaines choses. Ce qui n’excluait pas le fait non plus que certaines choses lui étaient impossibles. Mais j’ai su qu’elle avait cette capacité à laisser ouverte l’aventure de la lettre. De pouvoir l‘accueillir. La lettre féminise. En son accusé réception. Dans cette grammaire au féminin. Et ce rapport proximal avec la langue de l’inconscient, dégagée de la gangue qui rendait inaudible sa voix.
Puis est venu le temps de la méfiance envers une certaine jouissance esthétique. Un rythme m’échappait parfois. Mais une fois écrit, voilà que je n’en voulais plus. Il me fallait changer de rythme, chercher autre chose. L’écriture s’est ainsi modifiée sans que je ne me rende compte. Au fil des jours. Au fil aussi de la lecture de blogs amis. Leur présence à tous m’a modifiée comme leur travail avec le langage. Je les en remercie. Blog de Jan Doets qui m’a accueillie en son «  refuge pour les dépaysés ». Blog-laboratoire. Au fil des mois. Où mon écriture m’est devenue parfois étrangère à moi-même. Extimité qui me traversait de part en part. Eurékà de l’altérité.
Ecrire en langue. En immersion dans le langage. Souricières du désirs, de formes, de redondances, avec parfois des ratages qui font, dans les oreilles, comme le crissement de pneus qui dérapent sur le gravier. Ils ont beau vouloir dire et dire encore, mais les mots grésillent parfois. J’ai trouvé en eux, parfois, des figures brûlantes de vérité. Et elles ont carbonisé les lignes que j’avais l’habitude d’écrire. Plus de trace aucune jusque dans la mémoire. Pulvérisées. Jusque dans leur ombilic même. 
Cendres chaudes, venues de strates que j’oubliais au fur et à mesure, et leur vide m’allégeait. Elles suivaient une dérive que je n’arrivais pas à saisir, sur ce que certains nomment le « fleuve du devenir ».
Je regarde l’eau du fleuve. Tous les matins. Essayant de m’en pénétrer.
Ecrire en langue était ma première certitude. Travail de la langue. Poésie qui n’est certainement pas rhétorique, mais seulement joie simple des mots qui ne baignent plus dans les sens familiers.
C’est ce métissage expérimental que j’ai essayé de réunir. Non dans une logique de textes. Il n’y en a pas. Mais ils me sont apparus au contraire, superpositions, géologies, fractales, d’un parcours, espaces, temps, brouillés, décalés. Chaque texte m’est apparu comme une étape d’un chemin de randonnée, GR du rêve, errant le long du rivage. Alors j’ai vu pousser des gargotes où il était possible de s’arrêter. Un instant. Ah, déguster des madeleines qui n’ont jamais existé mais qui voudraient, chacune à elle seule, faire apparaître la fleur de sel du langage, sa morsure sur la peau des mots. Ambitieuses délicatesses.
J’ai alors vu boiter sur le chemin de halage, s’en allant de dos, cahin-caha, bras dessus-bras dessous, des poésies en rébus.  Rebuts obliques et ironiques. Paroles en connivence avec le silence. Lumières et nuits de l’âme. J’ai alors pris ma lampe torche et j’ai essayé de les suivre.




                                                    GR du rêve.

Tableau - Ancienne Carte po128
 



1. S André, Flac, récit suivi de  " l'écriture commence où finit la psychanalyse", Que,  p 149.

jeudi 30 octobre 2014

Architectures déstructurées

Où allez-vous bras dessus- bras dessous ? Mécanique désossée jusqu'à la moelle. Rien que des histoires à raconter. Minuscules. Dérisoires. Rien de rien. Mais le rien est révolu. Et il n'en savait rien. Il avait oublié d'où il venait. Et il s'est déshabillé jusqu'à se désosser. En pensant  dire la vérité.

Au seuil du vide. Un petit tour tout de même, m'sieurdame ! Un petit tour. Pour s'étourdir.
Et tous les jours, dans les oreilles. Toutes ces paroles qui bourdonnent. Venues d'une autre scène. Et qui défont les frontières. Câblages déstructurés. Entre deux chambres tôles ondulées.


Elles se cherchent. Une âme, un corps, une vérité,  pour vivre un peu tout de même. Avec la femme et l'homme, et l'enfant et le chien, sans compter la paille des lignes.



Des histoires encore des histoires. Grondant derrière les scènes de la nuit. Dans les draps durcis de sueur. Travaillant le rêve, torturant le langage.

             

 Elles ont mêlé le sucré et l'amer.

Mais tout cela survivra-t-il, si ce n'est qu'artifices de forme ?

L'on sait bien. Qu'au bout, oui au bout.  Oui mais quand même.

 Encore un petit tour. Oui tout de même.

Toutes ces histoires sans histoires. Qui n'échappent pas aux refrains. Dérisoires ritournelles. Elles cherchent. Y croient. Sans jamais s'y croire. Juste le temps de le dire. Et d'en prendre acte. Y. En

Ânesses en déroute.

A nouveau jouissives. 

Petites vies de pages blanches.

Qui...

Un petit tour et puis s'en vont.















mardi 28 octobre 2014

Ecrire, l'inconscient dans la main ?

Avoir tant parlé et puis dire encore. Jusqu'au roc dur de ce qui est possible de dire. A en user les mots, délier les phrases, éroder les habitudes. Et venir effriter les habits de l'être. 

J'avais espéré que se lève le silence. Et pouvoir écrire enfin. L'inconscient logé dans la main. Libre. En rébus, à saute-mouton, sur les vagues du langage.



Et voilà que s'envolent les significations usuelles. Poésie à la lampe de Psyché. Dans la joie d'Eros. En délicatesse avec les sens du monde. Nouveaux sens insensés. A revisiter. A inventer. A tisser. Etoffe sans joliesse. Sur une langue rugueuse.

Après la parole, écrire ? Avec l'inconscient en lampe torche. Et la solitude au fond des mots. Cicatriser, panser, rêver peut-être. Encore un effort. A la lettre. Jusqu'à l'oblique. Là où tombe le mot. Puis une couleur, et puis un son. Incidents. Ah, je rêve d'une musique qui danserait les mots. Pour leur donner enfin. Ne serait-ce qu'un peu de corps. Semblant au vernis de chairs délicieuses, perlant d'histoires à fleur de peau, et  habillant le squelette de l'âme.





Natures mortes. Pelures de l'existence. Petites histoires de rien.

Rien de rien...











Chardin. Prunes et pêches.

dimanche 19 octobre 2014

Le blog comme laboratoire

Une amie m'a envoyé un texte qu'elle avait écrit, il y a longtemps. Toujours d'actualité, m'a-t-elle dit. C'est sans doute ce qu'on nomme le hors-temps. Il y était question de silence, de blanc, de vide. Texte ténu, entre géométrie et finesse, l'un désignant la terre de l'autre dans son étrangeté.

J'ai pensé à toutes ces anecdotes enfouies au fond de nos nuits. Dérisoires et si pourtant elles contenaient toute la vie, dans ses éclaboussures de jouissance, ses fanfreluches périmées et leur note animale, insistante, familière. Sans foi ni loi. Musique barbare au coeur de l'humain. Devenue seulement bruits que le silence ensevelit. Dégustation des vieux rêves de la vie, que ne vous fait-on pas dire ?

Je suis revenue vers le silence. Je m'y suis blottie. Face au blanc et aux échos venus des nuits endormies, là où devait naître la pureté de leur semblant, sont venus en cohorte, mots, phrases. Dans la solitude des lettres. Elles ont dansé sans fin, devant mes yeux. Et je n'ai pas su avec elles, broder au moins une histoire, une seule. J'ai raturé, gribouillé, effacé.  Restes et débris. Tous riaient au fond de la  poubelle. 

J'ai voulu  écrire. Ecrire. Encore écrire. Il y eut soudain devant mes yeux, un passage de lettres en poste restante, aux adresses improbables.


J'ai déchiffré leurs timbres, leurs pays et puis encore leurs dates, le cachet de la poste faisant foi dit-on. Mais de quoi ? Une ombre  passe. Histoires, histoires que tout cela. Effacées. L'une après l'autre. Que recueille le blog au fil des saisons. Laboratoire. Expérimentations.  Empilements. Consignes de l'invention. Hésitantes.Trébuchantes. Dépôts.




Ecrire comme une main tendue vers l'autre. Cet ami logé dans le blanc du silence. Assis sur ses nuages numériques. Et qui parfois répond. 

Et de ces lettres au panier, je me suis fait des cocottes, des avions, et puis des chaises, des tables et puis des chardonnerets, des fruits et des fleurs impossibles.
Origami de la vie. Qui rit et s'ébaudit. Mais revoilà encore les fossés et les ornières où butent les histoires. Manro de l'impossible...





Ecouter le silence, espérer sa connivence avec la parole. Une main tendue vers.

Un jour peut-être.

jeudi 2 octobre 2014

Souricières du désir.

-Excusez-moi, je n'arrive à écrire que des anecdotes, dit la main.
-Excusez-moi, j'entends plus que ce que je ne peux dire, dit l'oreille. J'entends des histoires qui m'apprennent la vie. Par des fenêtres que je n'aurais jamais empruntées. Mais quand ces histoires ont passé le seuil de mon tympan, le particulier qui les a dites, vient faire écran. Pourquoi, je ne sais pas. Et je n'arrive plus à entendre. 
-Excusez-moi, les mots dérapent quand je veux dire, dit la bouche. Je voudrais dire, et dire au plus juste. Avant que cela ne puisse s'écrire.

"Tout se passerait-il pour l'écrivain dans un avant-livre dont il ne verrait pas la fin mais dont le livre serait la fin ?" (1)
J'ai repensé à cette phrase que j'ai longtemps méditée (2) : 
"L'analyse serait-elle un récit dont le récit serait sa propre fin ?"

Les anecdotes seraient-elles leur propre fin dans le sens où elles feraient entendre toutes les incertitudes en trajet, trébuchements, réveils minuscules tout le long, et qui sont la texture même du chemin. Consistance de ratages, croyances, détails en ses intimités. Souricières du désir. Eclairs. Qui n'excluent ni la gêne ni l'horreur de savoir.




















1. E. Jabès, Le livre des marges, Biblio Essais Folio, p. 50.
2. J. Lacan. Le désir et ses interprétations, séance du 1er Juillet 1959. cité in Ly-Thanh-huê, Le réveil en tous ses états, L'harmattan, p236.

mardi 30 septembre 2014

Marges


Toujours.
En exil de soi. Une lettre, une image, un monde. Et la chance d'un mot, un seul. Un pied dedans. Assigné à résidence. Un pied dehors. Courant vers les marges. Volutes volubiles. Enfilades et échappées.

Ecrire dans les marges ; entre les lignes ;  sous le point ; flottant sur la virgule ; en ce no man's land ; drone furtif.

Je me suis plongée dans leur encre. Et soudain ce texte de Jabès.

"Nous lie le livre, ou plutôt ce qui tend à se faire livre et qui jamais ne se fera.
"Un récit ? Non pas de récit, plus jamais." Le récit consiste à permettre le récit, à le laisser venir.
Aucun récit n'a lieu. Il n'y a point de lieu ici pour le récit.
Vos récits s'écartent de la voie du récit pour ne plus être que la découverte de la parole à sa fin, à ses derniers instants audibles, inscrits.
Linéaire, fragile, insidieuse est l'écriture ; d'une limpidité désarmante. Nulle part, le moindre excès. Quelle leçon ! Et quel miroir envoûtant ! Rassurante à certains égards, mais seulement en apparence. Ainsi, la transparence.
Comment dire ce qui nous lie ? -En me référant à l'exil peut-être, qui est le centre, la tache d'huile.
L'écriture est toujours refoulée.
Outre-vie, outre-nuit se tient le livre." 1






A l'ombre des piliers courbes. Tentatives d'écritures. Défaites. Ligne à ligne, mot à mot. Filant. Réflexions réfections. Molécules. Atomisées. Sous mes yeux. Elles ont pourtant rendu vie à l'effort. Et comme on dit rendre l'âme, elles l'ont remise aux mains du langage. Linceul de semblants.  Dont le souffle est venu effleurer les lèvres pierre de la nuit.

Je cherche. Est-ce le vouloir logé dans l'acte d'écrire ? Ou l'acte seul sans vouloir aucun. Je cherche écrire. Dans sa force dépouillée. Et je ris, de ce vouloir dérisoire. Revenu par la fenêtre. Figure archaïque. Indigente.
                                                        Logée en ses feuillets de pierre.
Billets de blog.
Poussières de vie.
Ecritures improbables.
Je vous cherche.

Faut-il se mettre en marge pour écrire ?





1.  E. Jabès, Le livre des marges, Biblio, essais, 1987, p 86.

lundi 22 septembre 2014

En transit temporaire




Le temps s'altère, entre deux escales. En suspens. Il compte ses moutons.  Et un, et deux et trois. Tous en nuages.





Sur les ailes


Loin des villes.


Une fois le grand passage, âmes errantes devenues, circule-t-on comme on voyage en avion ? En surplomb. Observant de loin la vie. Sans jamais s'inscrire dans aucune. Mais se projetant dans toutes. Intimités-odyssées. Et Calypso et Circé. En transit temporaire. Dans leurs îles éphémères.
Ecrire. Et puis retranscrire. 
Tous ces rêves de la vie. 
Et puis croire les habiter.
Encore. 
Toujours.
Bien qu'en surplomb. 

C'était
Sur l'aile d'un avion.




dimanche 21 septembre 2014

Temps déconstruit.

Je me suis demandée si les images que je voyais n'étaient pas toutes intérieures ...

Imprégnées de l'horloge d'un temps.

Au singulier.









Où se déploient des scènes puis d'autres

Jusqu'à leur déconstruction-traversée

Seulement Ecume.

Temps gris aujourd'hui.

Dimanches de la vie.

A partager avec les amis venus du net.

mardi 16 septembre 2014

Sphynge inquiète

Je t'avais toujours vue impériale et questionnante. Et te voilà égarée et inquiète.



Mutante accrochée à ton blason. Aux pattes griffues trop courtes pour tenir debout. Agrippée à la pierre. Les ailes durcies par les ans.

Je me suis retournée et te voilà soudain transformée. 



Petit animal apeuré. Rêve de pierre suspendu. On te dotait d'énigmes. De sanctions. Te voilà recroquevillé. Attendant le regard du passant. Ils connaissent tous l'histoire. Elle est rentrée jusque dans la moelle de leurs os. Blanchie. Comme la pierre qui les accueille. 

Questions. Réponses. 
Au détour de l'angle du mur.

Ton regard de pierre. A soupesé alors ce qui semblait si ferme. Les idées les plus dures. Devenues cendre avec le temps. 

Les vrais textes ne concluent pas. Ils ouvrent. Fourmillent. Comme le crépitement des pensées qui toutes, une par une, voudraient saisir. 





dimanche 14 septembre 2014

Tessons tessères


Ce sont des débris, à l'image de la vie, dispersés, disparates, disjoints, errant sur l'océan du temps.









Ils m'ont fait penser à ces débris que l'on trouve dans les jardins des vieilles maisons. Tessons de vies antérieures dont il n'y a pas à chercher la partie manquante. Car il n'y a jamais eu de tout. Débris seulement disparates, surtout incongrus. Sur le chemin. Parsemés. Tels ces bouts de verre enfouis dans le sable et arrondis par le ressac des vagues.

Tessons, tessères.Vous ne donnez rien à comprendre. Hors contexte, hors cadre, seulement singuliers. Dans cet été indien, chaleur à la lumière blanchie. Desquamant des socles de mémoire. Vers la fraîcheur des oublis. Lettres, mots, couleurs attendent. Suspendus. Dérivant. Dans leur coquille. Et guettant la faveur du temps.

vendredi 5 septembre 2014

Vases communiquants. 1. La maison de l'autre, avec Eric Schulthess


J'ai proposé à Eric, ce thème " la maison de l'autre", car écrire chez l'autre me l'a évoqué. Toile de fond où se trament des écritures peut-être neuves en passant par chez l'autre. Que déménage donc ce " chez l'autre" ?



"C'est ma maison" Texte de Eric Schulthess.



 C’est ma maison depuis près de trente ans. Pourtant je n’y dors pas. Je n’y ai jamais dormi malgré les semaines et les mois passés enfermé là-dedans, assis à la fenêtre constellée d’insectes morts qui fait face à ce pupitre à manettes où mes mains jamais ne trouvent le repos. Bruyante, cette demeure. Agitée. Toute la sainte journée, ça tape ici. Ça claque, ça vibre et ça couine. Le silence me manque.

Je ne parle presque à personne, perché là-haut. Parfois, je suis bruyant. Je siffle fort. Surtout lorsque ma maison se retrouve soudain plongée dans le noir. Dans un tube obscur qui peut être si long que je me demande si je vais en sortir. Alors je siffle et ma maison siffle à l’entrée du gros tube. À la sortie aussi. L’autre jour, des gamins ont fait mine de traverser sur mon chemin. Ils se sont ravisés au dernier moment. Grâce au sifflet qui prévient du danger. Parce que ma maison est très dangereuse. Voyageuse intrépide, elle se lance sur la voie que je lui choisis à chaque fois. Il ne faut pas se mettre en travers de sa route au risque de rejoindre dare-dare sa dernière demeure. Je me souviens aussi que ma maison a reçu des pierres plusieurs fois. Lancées depuis le ciel. Toc tac sur le toit. Elles ont frôlé la fenêtre. Je ne suis pas sorti pour attraper les coupables. Impossible.

Depuis quelques années, je retrouve ma maison décorée le matin. Pendant la nuit, des inconnus viennent lui donner quelques coups de peinture. Un peu brouillon je trouve, le travail de ces artistes. Ils ne connaissent pas bien l’orthographe. Sur la façade, juste en dessous de la fenêtre, ils ont écrit Zen. Mais avec un C à la place du Z. Zen. Il me faut bien l’être un peu dans cette maison où j’ai passé tant de Noëls et tant de vacances loin de mes enfants depuis près de trente ans. Seul face à la fenêtre, le cul posé sur un fauteuil en métal et le regard lancé sur ces rails qui défilent et qui claquent et qui couinent.

  




 Dans un an et demi, je quitterai cette maison pour toujours. Expulsé d’office je serai. D’autres s’en occuperont. C’est programmé. Plus besoin de siffler pour prévenir du danger puisqu’il n’y aura plus de danger. Je rêve d’une autre maison bien sûr. Pas trop le temps de la chercher mais elle commence à se dessiner dans mon imagination. Il y aura de grands champs tout autour. Et puis des volets blancs, un portail blanc, du lierre au mur et une cheminée haute. La fenêtre donnera sur des arbres et je pourrai enfin la laisser ouverte aux quatre vents. Je sais qu’elle plaira à mes enfants et à mes petits enfants. Ils y viendront en vacances et nous y passerons tous les Noëls.






"La maison de l'autre"Texte de Lanlanhuê chez Eric Schulthess



mardi 26 août 2014

" Le ressac BLABLA"

"J'étais Hamlet. Je me tenais sur le rivage et je parlais avec le ressac BLABLA, dans le dos les ruines de l'Europe."


Heine Muller. Hamlet Machine




jeudi 7 août 2014

Numericon : eυρηκα or not eυρηκα ?


1

2


Si ceci n’est pas une pipe, ceci est la mémoire-éclaboussure du temps. Monstration-sang. Affleurant. Eructant. Magmas intérieurs. Nulle démonstration. Seulement, présence. Foison-moissons. Eclatées sur la tempe. Altérités aux doux regards clos. Immobiles. Oublis. Indolores. Entre pomme et orage dans son verre d'eau.

Porte nouvelle, certes. Mais mémoire toujours, depuis que le monde est monde. Suintant à la surface de son bloc d'histoires. Empreintes magiques.

                                     La main sur le livre, dessin de Rene Magritte (1898-1967, Belgium)3


Si ceci n’est ni une main, ni un livre,
Livre, ne véhicules-tu pas ton cortège d’habitudes ? Pierres, papyrus, rouleaux, feuillets, livres, pêle-mêle, tu étales tes trésors. Odeurs, touchers, couleurs, lignes et formes. Et puis ta tranche, et puis ton dos, et puis tes fils, et encore tes trames emmêlées, vies invisibles aux destins dessications. Familières.

Mais quid de ces nouveaux objets non identifiés ?
Ils ignorent tout de ce qui te déterminait. Et ton vieux nom de livre dont on les affuble, manipule le regard qu'on porte sur eux. Alors qu'ils en rajoutent, et des films, et des photos et des sons. Convoquant et le regard et la lecture, et les sons et l’écoute. Et de l'odeur ou du toucher peut-être un jour.

Atopies, apories, épiphanies.

Nuages enfermés, traversant des portes sans frontières.

    4
                           
Nouveaux objets non identifiés,

Ne faudrait-il pas trouver un nouveau vocable pour vous nommer ?

Numericon !

eυρηκα or not eυρηκα ?

:-) 




PS : Si quelqu'un a d'autres idées ?



1.Ceci n'est pas une pipe, Magritte
2.La mémoire, Magritte
3.La main sur le livre, Magritte
4.La victoire, Magritte



mercredi 6 août 2014

Numérique : virtuel ou réel ?

Des mots, des noms, de simples phonèmes, tous sur le fleuve : Giulietta, Gravier, Champrosay. Champ rosé roulant ses graviers de pierraille dans la vigne des annnées. Câu ông Lanh, quân tu, nha xec, et voilà une fête des lanternes où un poisson de papier a brûlé, renversé par le vent. Ce sont des moments qui n'ont jamais existé, si ce n'est dans les méandres du temps. Réelles virtualités qui  font soudain entendre l'eau lourde de la vie.




Et nous avons parlé de ces fragments qui évoquent ce qu'ont écrit déjà tant d'autres, et parfois en tellement plus aboutis. Et puis aussi de ce travail qui pousse ses linéaments, au jour le jour, amenant son limon d'humanité-hésitation. Ecritures. Empans.



Et puis il y a ceux, pétris de cette matière impalpable, neuve parfois, pas toujours cependant. Façonnage numérique. Nouvel artefact. Sable dans les yeux qui scillent. Le monde est flou. Mais son noyau est dur. Toujours. Là. Et il aura fallu une vie pour en lever les squames.

Pas de réponse. Univoque. Totalitaire. Là non plus. Opportunité seulement, de la lettre en ses transits temporaires. Hic et nunc.

Fenêtres numériques

Espérances.

Peut-être.




J'ai pensé alors à toutes ces rencontres depuis un an. Blogs et blogueurs et blogueuses, amis venus du nuage. Liens nouveaux faits de présence-absence. Ne voulant les liens d'une réalité en deux dimensions. Et chacun cherche. Sur les strates des mots, images, représentations, toutes parsemées. Moments-rencontres-trouvailles qui n'ont jamais existé, si ce n'est sur la  toile des errances-arcanes.

Tu étais là derrière moi dans la voiture. Je ne me suis pas retournée. Car ta voix venait pourtant de l'autre côté de la terre. Hier encore. Comment se fait-il que je l'entendais à présent derrière moi, me parler de mille choses. Pierrailles, limon, fraîcheur de l'été, moiteur des tropiques, tous entremêlés. 

Virtualité du numérique. Ici, là-bas, nulle part et pourtant bien là. 
Avec ses consentements, ses contractions, ses effacements, ses chemins d'images, de sons, de films, et dans les lignes, les mots défilent. J'ai pensé à ces faussaires qui patchworkent l'existence, pêle-mêlent tableaux-photos-époques. Le monde est flou, il est vrai.

Matière sous mes yeux. Mes doigts l'effleurent, et elle vient maintenant, se loger jusque dans mes oreilles. Lichens de moments-pierre. Eternité. Dure. Friable. Ex-time, résolument, certainement.




Formes aux
Virtualités soudain réelles. 
Matière numérique quand tu nous tiens...




Et j'ai vu mes os apparaitre sous le voile des mots. Suaire prenant le large du monde des choses. La vie en été, voit l'automne encore lointain. Sourde. Au fracas du devenir sur la matière.









C'est un moment partagé qui n'a jamais existé, numérique, virtuel, réel ?

Bon voyage, Anh_Mat !




vendredi 25 juillet 2014

Littérature-monde ou l'extime à la lettre ?




Il est des phrases-écho. Venues d'Afrique, d'Asie, d'Amérique ou d'Europe. Parfois même nourries au sérail. Sympathiques. Attachantes. Attirantes. Doux mirages. Qui donneraient matière à cette idée folle d'une littérature-monde. Idée séduisante mais si désuète, empreinte de ses vieux rêves d'exotisme. Ou d''une altérité mondialisée, restée dans sa coque imaginaire, tapie dans la dérive du temps.

Une littérature qui se voudrait voyage, dérangement, déménagement, peut-être et surtout de soi-même. Nature. Hybride. Lumière... Qui amène ses questions sans réponses. Plurielles. Parsemées sur les ramures de la vie.


                                                 



Mais le propos me revint, insistant. De nuit, de jour, le monde m'habite. Il est cette intimité fraîche, qui se projette au dehors. Pétrie d'une voix que l'on croyait venue d'ailleurs. Mais elle n'était que cette voix sans matière, intérieure, répétée, remodelée, réinventée. A force, ex-time devenue. Terra incognita, car ce qu'elle fait entendre est si enfoui que ses accents se sont faits oublier et paraissent à présent étrangers. Fenêtre nouvelle soudain, sur le langage et ses racines-matière. Bouche, corps, membres. Ombres de la vie. 

Et tous sont venus résonner dans ma tête. Echos pentatoniques. Dans la paix du soir. Hier. Avant le coucher. Echos lointains.

Et je les faisais tinter. Cloches de bronze, cornes de brume, sur les océans du monde, elles sont venues retentir sur l'oreiller des songes.

Je me suis blottie dans les draps. Nourrie de ces empreintes singulières. Dans ces bains de matière, de langues et de langage, surgis de leurs mémoires d'hivers. 

Prendre à la lettre leurs effluves pour faire exister le mot-matière, la lettre-saveur, l'encre-odeur, le noir soufflé de vide d'un bain sonore enfoui.

  Dans les sacs de mots. Le vent-texture


Souffle

A la lettre

La lumière du monde.




lundi 21 juillet 2014

Mais c'est de nuit...

Il a plu toute la nuit. Sans relâche.

Le chien a gémi.

Orages, vent, bourrasques. Puis soudain dans leurs souffles, grondements, bruits, voix. Conflits peut-être. Enfouis dans la mémoire. Et voilà que tous remontent le courant. Pénètrent les rêves. Affleurent la lumière. Autres scènes. Impromptues, incertaines. La vie ne voulait pourtant pas de conflits. Mais voilà, elle bouillonne, elle s'interroge, elle remue, se retourne et n'arrive pas à dormir. Tombant par surprise, hachant les pétales, déchirant les feuilles. Tourmente de l'âme. Que tutoie le vent. 

                                                                  "Où suis-je ?" se dit l'âme. 

                                                                       En écho le silence.

Mais c'est de nuit.



Car il y a cette folle croyance que l'issue ne serait qu'accident. Pensées soufflées par le vent. Qui fait tourner la tête et brouille la conscience. Nature égarée. 

"J'entre où je ne sais, mais ne suis-je pas toujours là ?"  se dit l'âme.

En écho le silence.

Mais c'est de nuit




Il y eut tant d'orages.

Le chien  a gémi.
                                  
Humain, trop humain.

Contre la pluie.

Pluie.

Et encore

Pluie.

Goutte

à

Goutte.


Sur les paupières de la nuit.