lundi 29 juin 2015

mémoires numériques à fond perdu





J'avais accosté je ne sais plus où. Parcourant les feuillets de ma mémoire numérique. Et voilà que je redécouvris la mienne. C'était un port. Qui passait. Avec son embarcadère. J'allais mettre le pied sur terre. Mais devant moi, s'ouvrit un vide. Clapotis roulis étrange tangage. Où le pied aimerait tremper ses doigts dans l'eau salée.


Cela aurait pu être. Mais où était-ce donc ? J'ai cru reconnaître des pins. Et leur montagne et puis leur ciel. J'aurais pu reconnaître. 
Ce vert herbeux qui tapisse les pentes...


 Et qui glisse vert algue devenu da zi bao sur le front de mer. Il raconte le ressac et les cris des mouettes. Il réverbère sous le soleil.


Mais où était-ce donc ? Ces laminaires fucus laitues sur bronze. Ici, ailleurs et nulle part. Taches brunes varech, humeur, humet du large. Pousse-pieds aliens surnaturels. Bouillons océan.


J'ai reconnu le chemin quand je suis revenue de l'embarcadère. A flanc de coteaux. "Dépêches-toi le bateau ne va pas t'attendre". Les mots résonnaient dans ma tête. J'ai couru. C'était dans la mémoire.


 Elles auraient pu être ces roches abruptes tombées dans l'océan. Taillées au couteau. Laminant la mer.


 Face à la marée. Qui monte.
Qui monte. Qui monte.
Deux fois par jour.


L'embarcadère désigne alors un autre plus loin encore. Il faut partir vers le large. Il retient ses monstres marins à fleur d'eau que l'équinoxe ne connaît plus.


 Je ne savais plus où tout cela passait. Ondulation minuscule dans un coin de la mémoire. Numérique seulement. Elle plisse les yeux.


Un portail s'est ouvert. Il a grincé. Etait-ce le vent ? Ils n'ont toujours pas graissé le gond. Ouvertures réel sur roses lavandes et agapanthes. Palette printemps frais. Un homme m'a ouvert. Jardinier d'un jour. Il m'a souri. Je ne le connaissais pas. Ni lui ni le jardin. Mais tout m'était si familier. " Entrez si vous voulez ! " m'ont-ils dit. La mémoire, ah si vous saviez, la mémoire. Qui ne garde que le lointain et n'accommode le présent. La mémoire, même numérique ! Gardée ainsi et qu'aucun regard ne revisite. Qui cuisine ses restes et repasse les plats.








dimanche 28 juin 2015

Barque oubliée


Elle sèche loin de l'eau. Ses planches sculptures sous les ronces enfouies.
Dans la longue fissure.
Eurydice  peut-être. Perdue dans l'humus.
Egarée, à fleur de broussailles.


Et la paille affleure, brindilles tombées du bec des oiseaux. Ils ont semé à tous vents leurs nids. Devenus vides, légers.
Tous envolés.


Il passait par là. Encore. 

Qui donc ?

Je crois qu'on l'appelait Orphée.

jeudi 25 juin 2015

la croyance celtique




-Tu lis quoi ?

-"Je trouve très raisonnable la croyance celtique que les âmes de ceux que nous avons perdus sont captives dans quelque être inférieur, dans une bête, un végétal, une chose inanimée, perdues en effet pour nous jusqu'au jour, qui pour beaucoup ne vient jamais, où nous nous trouvons passer près d'un arbre, entrer en possession de l'objet qui est leur prison. Alors elles tressaillent, nous appellent, et sitôt que nous les avons reconnues, l'enchantement est brisé. Délivrées par nous, elles ont vaincu la mort et reviennent vivre avec nous. ( I, 43-44)" 1






-Tu n'es pas un peu trop près ?
-C'est un risque en effet...


.1. Cité par  Roland Breeur, Singularité et sujet, une lecture phénoménologique de Proust, Ed Millon, Coll Krisis, p 165.

mercredi 24 juin 2015

Chaume







 Des mousses roses ont surgi. Vie et mort, hirsutes bigarrures.
Pas de deux sur lierre et digitale. Efflorescences.
Le coeur
Ce battement sourd
Sous 
Chaume  seulement chaume.

lundi 22 juin 2015

Iris en cours



Frissons soleil


Iris ténus


Estampes probables



Les pieds dans l'eau

le ciel est tombé dans l'eau


Un ciel dans les feuilles. Mais est-ce le ciel ?



Miroirs bleus 
Au fond des herbes.


Dans le puits 
Des moustiques lune. 


dimanche 21 juin 2015

pour les jours sans couleurs


Je les avais gardées dans la mémoire numérique


Tessons couleurs, arabesques vives. Ocre palette, bleus de mer, verts mouchetés, tous mélangés. 
Ensoleillés.


Ils ont scruté de leurs yeux d'ombre le soleil de midi. La vie était encore à son midi hier.
Déjà le soir ? Mais personne ne m'a rien dit.


Elle s'est juste retournée avec son sourire au regard d'enfant. Elle cueillait les coquelicots.


Là, ne les voyez-vous pas ? Pétales roses dans les étoiles bleu de mer ?
Aimez-vous les mouettes ? Elles ont griffé l'océan des traces de leurs ailes.
Couleurs, couleurs, la vie. Dans le tourbillon de la mémoire. Ce noyau en soi mouillé des couleurs du temps. Et qui reste sans âge.

samedi 20 juin 2015

Elle m'a dit que...


                                          Elle m'a dit que c'est une fleur à nom de tumeur.


Pourquoi donc ce genre de  choses ?


C'est le printemps, mais est-ce aussi pour ces fleurs ?


On voudrait les tailler au sécateur.


Résection, pollution.


L'effacer.
Et que seule reste la couleur pansement.
Se réveiller et qu'il n'y est plus rien.


jeudi 18 juin 2015

L'autre côté du fleuve


Molécules aux destins étranges. Dessus-dessous. Un jour ardoise, sable, un autre encore, herbe ou poule d'eau, un autre encore poisson ou ragondin. 


Poils si doux. Mutants à tête de sanglier.


Peuplant l'autre côté du fleuve. Mais si loin. Leurs vies s'écoulent et certaines s'écrivent. Ah oui ? Qui donc les lit ? Au milieu des griffures de l'herbe. Arabesque piquée dans l'eau. J'ai imaginé leurs maisons. Leurs terriers. Leurs mensonges et puis leurs guerres. Et puis leurs traversées.

Ce ne sont que des bougés. 
Sur le fleuve, toujours le fleuve. 

Passeur. 





lundi 15 juin 2015

Raté !







Il fait gris ce matin. Tôt encore. Longue journée pour les seringats. Habillés dans leurs frimas.Ils penchent et ne voient jamais les hommes qui passent.

Une goutte d'eau. Puis deux. Puis trois.
Le long des feuilles.

Et soudain voilà le fleuve.



Bois flotté. Eblouissant.

Mais je n'ai plus que ma mémoire. Pour te retenir. Et te rater.

Encore...


Encore...


Encore...


Encore...




dimanche 14 juin 2015

promenade sous la pluie


"C'est une promenade sous la pluie" ont dit les coquelicots, les pissenlits et puis les trèfles. 


Mais la lumière, que faites-vous de la lumière, a dit l'escargot. Parti dans les rainures du mur. Mais était-ce encore un escargot ? 


Il a lissé les aspérités des pierres sèches. De strate en strate. Il s'est promené. Les écailles de nuit gorgées de rêve. 


Sans lettres, ni mots devant le vide. Coquelicots, pissenlits et trèfles. Debout à l'orée de l'ombre, se sont alors demandés. Et si on se prenait un peu de noir et aussi un trait de bleu, trempé dans un verre d'eau ?


Ils se sont alors faufilés. Coquelicots, pissenlits et puis trèfles. Ceux qui racontent des histoires sans queue ni tête. Qui leur ont tourné la tête.


Assis sur le rebord de la nuit, ils ont alors vu monter la mer. Et dans les vagues, tournoyaient les embruns, les algues et les étoiles. Perdus dans des couleurs sans noms. Ils ont alors découvert au fond de l'eau. D'autres couleurs, invisibles encore. Poudres devenues. Brumes surnageant. Alcools. Humeur. Verdeur. En sa pointe d' astringence. 


C'est le printemps avec un zeste de pluie. Vous en prendrez bien un verre ? Ont dit les coquelicots, les pissenlits et puis les trèfles. Ceux qui racontent des histoires sans queue ni tête. Qui leur ont tourné la tête.